Une maison bioclimatique

... clé en main

 

 

 

Le projet.

 

Ayant fait l’acquisition d’une parcelle dans un nouveau lotissement, je souhaitais sortir des conventions afin de réaliser une maison qui ne subisse pas les effets de la canicule mais soit agréable à vivre en toute saison, consomme peu d’énergie et soit respectueuse de l’environnement, en d’autres termes une construction « bioclimatique ». C’est dans un petit village de Vendée, situé à une quinzaine de kilomètres de la côte, entre mer et bocage,  que ce projet allait voir le jour. Pays de pure tradition vendéenne, certes influencé par les modes du bord de mer mais qui est aussi celui de mes origines.

 

L’objectif était la réalisation d’un pavillon de plain-pied d’une surface de 100 m2, sur un terrain de 620 m2, avec pour contrainte, de pouvoir accueillir une personne à mobilité réduite, c’est-à-dire évoluant en fauteuil roulant. Pour répondre à cette dernière exigence, il sera nécessaire d’augmenter la surface d’environ 15%, notamment pour le passage des portes, l’accès à la salle de bain, le couloir et les espaces de retournement, l’ensemble occupera donc 115 m2. Néanmoins et avec l’aide du professionnel, nous avons pu réaliser un espace homogène, clair et lumineux où tout circule bien..., et sans doute agréable à vivre.

 

 

La conception architecturale.

 

C’est le terme « bioclimatique » que nous devons utiliser pour ce genre de construction car il traduit bien l’esprit dans lequel un tel projet s’inscrit. C’est bien sûr une maison « solaire », mais mieux que cela, la conception architecturale et le choix des matériaux font que cette maison sera facile à chauffer l’hiver et qu’elle conservera la fraîcheur tout au long des saisons chaudes que nous prédisent les climatologues – cela sans avoir recours à de gros appareils de climatisation.

 

Choisir son implantation sur le terrain est la première chose à laquelle il faut penser. L’édifice en L mesure 15 mètres de long et 13,70 mètres de façade. Notre petite parcelle n’étant pas idéalement située, notamment à cause d’une dénivellation et d’un rapport longueur-largeur défavorable, nous nous  sommes implantés en limite séparative nord de façon à libérer la plus grande surface au sud et ne pas être trop gêné par l’implantation du voisin nous surplombant. Le cahier des charges posait également quelques contraintes mais nous nous en sommes accommodés.

 

Nous avons opté pour une conception en L. En façade, un large porche d’entrée accueille le visiteur et devant le garage (intégré au bâti), une petite aire de parking reste toujours libre. Une chambre et un coin du séjour donnant également sur cette rue. L’autre partie du bâtiment s’étire le long de la limite séparative nord, sur une quinzaine de mètres. Les locaux inoccupés ou pièces qui ne sont pas des endroits à vivre, comme le garage-cellier, la salle de bain et les WC, sont adossés à ce côté nord. Seuls des pavés de verre dans le garage et un velux au-dessus de la salle d’eau apportent un peu de lumière. Un grand couloir dessert les deux chambres du fond, la plus petite donnant à l’est, l’autre ouvrant plein sud par une double porte-fenêtre, sur la terrasse et le salon de jardin.


 


Sur ce même côté, la cuisine communique directement avec le bloc séjour (la patte du L). Ce vaste ensemble reçoit la lumière toute la journée grâce à deux grandes baies coulissantes, l’une à l’est, l’autre au sud ainsi qu’à l’ouest une petite fenêtre et la porte d’entrée.

 

 

... En outre, cette dernière partie du bâtiment forme une avancée plein sud, qui protège la terrasse et l’entrée de la cuisine des vents dominants d’ouest, toujours assez forts à certaines époques de l’année. Nous avons voulu un salon de jardin qui ne soit pas dissocié de l’intérieur, pour cela nous avons choisi une baie coulissante dite « à galandage », ici les deux vantaux s’ouvrent au maximum en assurant la continuité bien agréable d’un espace de plein air !

 

Et pour les longues soirées d’hiver, rien de tel qu’une cheminée ! Le coin feu a été prévu dans le séjour, au point central d’où la chaleur pourra rayonner. Ici, le constructeur a aménagé en sous-sol une conduite d’air frais (diamètre 125). Nous sommes tombés sous le charme des poêles scandinaves car ils sont vraiment à découvrir pour leur esthétique mais aussi pour leurs qualités intrinsèques. Grâce à la double combustion, ce sont des appareils de chauffe écologiques et très performants. Le séjour, la chambre mais aussi la cuisine et le couloir devraient profiter de cette chaleur.

 

Quant à la chaudière et le ballon d’eau chaude, ils ont été installés dans le garage, adossés à la salle de bain de façon à réduire le délai de puisage et bien évidemment la consommation !

 

 

Les matériaux.

 

Les matériaux ont une importance primordiale pour la réalisation d’une maison de ce type. Outre la conception architecturale qui répond à des règles basées sur le bon sens et l’observation des phénomènes naturels, l’art du bioclimatisme résulte également d’un savant dosage entre les différentes types de matériaux selon qu’ils aient des propriétés d’isolants, de capteurs d’énergie ou d’accumulateurs de cette même énergie.

 

 

Dans n’importe quel habitat, les vitrages ont évidemment un rôle essentiel car le verre a la propriété de capter l’énergie solaire et de la retenir, c’est l’effet de serre. Pour cela, ils doivent être situés au sud, car c’est ici que le soleil émet le plus de rayonnement l’hiver. L’été, les ouvertures exposées plein sud seront peu affectées par la chaleur, car la course du soleil passe au zénith, il suffira de tirer les volets ou de déployer le store pour s’abriter. Pour limiter les déperditions la nuit ou par temps gris, nous avons choisi un double vitrage à isolation renforcée.

L’enveloppe de cette maison sera dotée d’une isolation très performante. Nous avons préféré deux isolants naturels, le premier d’origine végétale : la ouate de cellulose, l’autre animal, la plume de volaille (produit de fabrication locale). Mais elle devra également pouvoir stocker la chaleur – ou la fraîcheur selon la saison. C’est le rôle des murs en brique dite à « isolation répartie ». Quant au mode de chauffage par le sol, il tire également partie de l’inertie thermique de la dalle.

 

Pour le gros oeuvre, mon choix s’est porté sur la brique monomur. Ce matériaux m’a séduit à plus d’un titre : il permet de réaliser un mur porteur d’une épaisseur de 41 cm ( 37,5 cm plus les enduits), soit le double du parpaing, tout en assurant l’isolation thermique et le stockage des calories. Une seule opération est nécessaire : le bloc de terre cuite est micro-poreux et pourvu de nombreuses alvéoles qui font office d’isolant. Le premier rang doit être posé avec la plus grande précision, ensuite le maçon encolle sa rangée avant d’ajuster les nouveaux éléments. Contrairement au mortier de ciment, les joints ne font qu’un millimètre d’épaisseur, il n’y a donc pas de pont thermique ! Nous obtenons enfin un mur qui « respire »..., et qui permet à la vapeur d’eau de circuler au gré des variations internes ou externes au bâti, ce que ne fait pas le complexe parpaing de béton avec isolant en doublage intérieur (laine de verre ou polystyrène) et contre-cloison. L’équilibre hygrométrique d’une maison est un facteur important pour le confort de ses occupants et les économies de chauffage.

 

 

Outre l’orientation du bâti, l’inertie thermique est un des éléments clés de toute construction bioclimatique. La brique monomur répond à cette exigence d’accumulation et de stockage de l’énergie, car dans sa masse, un tel matériau a la capacité non seulement d’absorber la chaleur du soleil pour la restituer la nuit, mais également en saison chaude de conserver l’humidité et la fraîcheur comme les vieux murs de pierre d’autrefois. C’est l’un des rares matériaux industriels qui offre une solution de climatisation naturelle.

 

Le dernier avantage du monomur, c’est d’éliminer (autant que possible) les perturbations électromagnétiques.  Une maison construite ainsi est réputée pour limiter les effets des ondes électromagnétiques car les câbles enterrés sous-dalle et que l’on doit encastrer pour les passer dans les murs, sont censés émettre beaucoup moins de rayonnements puisqu’ils sont absorbés par la densité du matériau. Malheureusement, en France, peu d’informations circulent sur ces phénomènes et ce qu’ils peuvent générer sur la santé et les organismes fragiles..., alors que ces choses sont reconnues dans d’autres pays voisins !

 

 
   

A l’ouest, afin d’éviter les surchauffes l’été, nous avons réduit les surfaces vitrées, prolongé le haut-vent du porche d’entrée afin d’abriter la fenêtre du séjour. Plus tard, il est prévu ici de planter un arbre à feuillage caduque (type cerisier à fleurs) et une glycine ou autre variété grimpante afin qu’ils nous conservent un peu de fraîcheur.

 

 

 

 

 

Le captage :

Baies vitrées plein sud. Double vitrage basse émissivité. Coff K = 1,1. Iso-phonique dans chaque chambre.

L’isolation :

Murs en « biobric » de chez Bouyer-Leroux, épaisseur 37,5     R = 2,7.

Plafond : ouate de cellulose pulsée entre les fermettes, épaisseur 25 cm, R = 6.

Cloison garage : « batiplum » (isolant de production locale, à Ste Hermine en Vendée à base de plume de volailles) ép. 80 mm, R = 2,4.

L’accumulation :

Murs en « biobric » de chez Bouyer-Leroux, matériau porteur et isolant mais aussi accumulateur.

Plancher chauffant, basse température, épaisseur 14 cm avec l’isolant, tuyaux en polyéthylène réticulé.

 

 

 

Une expérience personnelle.

 

Le domaine des énergies renouvelables et de l’isolation écologique ne m’était pas étranger. J’avais entrepris diverses améliorations à mon domicile près d’Orléans : isolation des combles, construction d’une véranda et installation d’un chauffe-eau solaire par exemple, mais n’avais jamais fait l’expérience d’un véritable chantier.

 

Ne résidant plus en Vendée, il me fallait trouver une entreprise ou quelqu’un de compétent pour mener à bien les opérations. Fallait-il faire appel à un architecte ou un maître d’oeuvre, mais pour une petite surface, cela en valait-il la peine..., ne risquions-nous pas de renchérir les coûts ?! Moi-même, je partais avec l’idée que ce genre de projet n’était pas bien connu et qu’il me faudrait sans doute sortir des sentiers battus.

 

J’ai d’abord contacté quelques uns des (nombreux) promoteurs de maisons individuels en leur demandant s’ils connaissaient la construction bioclimatique et la brique monomur.

Je voudrais souligner que le terme « bioclimatique » - auprès des métiers du bâtiment - n’est pas un terme couramment utilisé et j’ai eu la surprise de constater combien on pouvait me regarder avec des grands yeux..., chez les professionnels j’entends !  « Maison solaire » , ils connaissent : « on fait pas ça chez nous », mais « maison bioclimatique » qu’est-ce que c’est ?

 

Alors qui donc allait bien pouvoir me construire une telle maison, tout en briques et de surcroît adaptée pour un fauteuil roulant ? Parmi les quelques pavillonneurs  restant en lice, je devais en contacter trois. Un se désista rapidement, il en resta deux proposant des prestations d’un niveau assez proche, mais finalement mon choix s’arrêta sur celui qui sut répondre au mieux à ma demande. Le responsable commercial de cette agence avait déjà fait des expériences de ce type et son bureau d’étude était plus réactif que le concurrent. Et je dois lui rendre aujourd’hui cet hommage, car Monsieur P. des Maisons XXX est un homme qui resta toujours à l’écoute. Passionné par son travail et exigeant sur la qualité, il a su faire preuve également de toutes les compétences. Ainsi au fil de nos échanges, le climat de confiance allait s’installer. C’est ainsi que nous avons pu réaliser des plans sur mesure répondant parfaitement à nos besoins, tout en conservant le bénéfice des garanties dommage ouvrage et autres modalités allouées par sa société.

 

Nous signâmes un premier engagement en mars 2004, le permis de construire fut accordé au début de l’été. Les travaux de terrassement commencèrent en octobre suivant et la maison fut livrée fin juin 2005 conformément au planning du constructeur.

 

Tout au long du chantier, je n’ai guère senti de critique vis-à-vis de notre projet, souvent de l’attention même de la curiosité..., mais à aucun moment de réflexion hostile. Globalement, les choses se sont bien déroulées, hormis bien sûr les quelques aléas inhérents aux métiers du bâtiment.

 

En Vendée, le style régional se distingue par des normes dont on ne comprend pas toujours le sens. Exemple : les débords de toiture sont interdits, spécialement en Vendée alors qu’ils sont largement utilisés en Aquitaine et très efficaces pour réduire l’ensoleillement (le climat vendéen n’est-il pas aussi doux ?!)... La pente du toit ne doit pas excéder 35%, ce qui fait moins de 20°, cette faible inclinaison exclu toute possibilité d’aménagement des combles et rend inefficiente la pose de panneaux solaires pour un  chauffage combiné quand le soleil d’hiver est rasant..., et également comme autre singularité : les fenêtres doivent être plus hautes que larges, mais en vertu de quoi ( ?) cela me laisse encore très perplexe... !

 

 

Plus cher ?

 

Cette maison nous est revenue à 133 000 euros pour une surface de 115 m2 (hors terrain et raccordements) soit 1156 euros/m2. Nous avons évalués les surcoûts à environ 10 ou 15 % d’une construction en parpaings, équipée de simples convecteurs électriques. Le retour sur investissement, compte tenu des performances énergétiques d’un tel bâtiment, sera rapide et le niveau de confort, été comme hiver, bien meilleur !

 

Le style de cette maison reste sobre et dépouillé, sans guère de fioritures mais répond bien à notre objectif initial. Bien sûr, nous aurions pu lui donner un caractère plus marqué, sculpter les volumes, oser certains éléments de déco, mais pour nous, l’essentiel a été atteint : un grand ensemble clair et lumineux, confortable et facile à chauffer où tout circule bien, et cela sans déborder de notre enveloppe budgétaire. Pour les amateurs du tout « énergies renouvelables », je dirais simplement que cette structure « passive » constitue une solide base qui pourra évoluer au fil du temps. Pour passer en solaire « actif », nous pourrions y adjoindre des panneaux thermiques pour chauffer l’eau, ou transformer la lumière en électricité grâce à des panneaux photovoltaïques. Avec l’adjonction d’une chaudière à granules de bois, nous pourrions pratiquement couvrir 100% des besoins annuels, en mode chauffage mais aussi électrique, grâce aux énergies renouvelables. Différentes aides et mesures fiscales pouvant dépasser 50% de l’investissement sont mises en place, se renseigner auprès de l’ADEME, de l’Espace Info Energie ou à votre Centre des Impôts.

 

133 000 euros pour 115 m2 de plain-pied. Hors terrain et raccordements. Ce prix comprend les prestations suivantes : murs en brique monomur de 37,5 cm, garage intégré à la maison, plancher chauffant avec chaudière au gaz naturel et sonde extérieure, salle de bain avec baignoire + douche, deux WC, carrelage dans toutes les pièces et parquets dans les chambres, deux baies coulissantes (dont une à galandage) avec volets roulants électriques, double vitrage basse émissivité pour toutes les ouvertures et iso-phonique pour les chambres, isolation du plafond en ouate de cellulose (25 cm) et batiplum (plume de volaille) autour du garage, charpente recouverte de voliges.

 

En conclusion, cette expérience a été riche d’enseignements. Le projet fut étudié pendant l’hiver 2003-2004, juste après ce fameux été caniculaire, depuis il y a eu les ouragans en Amérique, mais aussi un pétrole à près de 70 dollars le baril et le gaz naturel renchéri de 25%..., c’est-à-dire pour nous tous, une meilleure prise de conscience des problèmes énergétiques et autres phénomènes climatiques. Si nous ne modifions pas nos comportements, quel héritage laisserons-nous aux générations futures ? Il ne s’agit pas de grands sacrifices ni d’une perte de pouvoir d’achat, la preuve en est : nous avons réussi à concevoir un habitat sain et durable avec pratiquement les mêmes moyens !

 

Les professionnels du bâtiment sauront-ils évoluer vers une attitude plus responsable ? Alors qu’auprès du grand public, on sent une demande bien réelle pour tout ce qui est qualité environnementale et développement durable... Sans doute faut-il adresser le mot de la fin  à Mesdames et Messieurs les Promoteurs : « A quand une maison bioclimatique..., sur catalogue ?! »

 

Denis BULTEAU, semecol

pour plus de renseignements:

tel. 02.38.52.04.91

Pour documentation, je citerai simplement trois ouvrages facilement accessibles :

Guide de l’architecture bioclimatique en 4 tomes, Alain Liébard, Ed. Systèmes Solaires 

La maison des [néga]watts, le guide malin de l’énergie chez soi, Ed. Terre vivante 

L’isolation écologique, Jean-Pierre Oliva, Ed. Terre vivante, conception, matériaux et mise en oeuvre.